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Le blogue de Jacques Gauthier

4 mai: Bienheureuse Marie-Léonie Paradis (1840-1912)

Écrire sur un témoin du Christ est pour moi une grâce. J’ai souvent pris le temps de relever ce défi, car j’aime le Christ et ses amis. Mais écrire sur une religieuse du XIXe siècle qui a fondé une communauté dont la mission se résume à servir Jésus, en les personnes des prêtres et des évêques, ce n’est pas très « gagnant », comme on dit aujourd’hui. J'ai pourtant accepté cette demande des Petites Sœurs de la Sainte-Famille de faire connaître leur fondatrice, et j'ai été séduit par sa bonté, d'où la parution de ce livre en 2012: Les chemins de l'Évangile. Entetiens acec Marie-Léonie Paradis.

 Marie Leonie

L'humble parmi les humbles

Alodie Virginie Paradis est née le 12 mai 1840 dans le village de L’Acadie, au Québec. Attirée très tôt par le Christ et l'Eucharistie, elle entre à 14 ans chez les Sœurs Marianites de Sainte-Croix, dont le charisme est l’enseignement et le service des prêtres. Elle sera envoyée en mission aux États-Unis et au Nouveau-Brunswick. Elle fonde la communauté des Petites Sœurs de la Sainte-Famille. Mgr LaRocque les invite à Sherbrooke. Approuvée par Rome, la Congrégation va se développer rapidement au Canada et aux États-Unis, grâce surtout à la bonté maternelle et attentive de mère Marie-Léonie. Elle fait plusieurs miracles de son vivant, dont des guérisons inexpliquées. Elle s’éteint paisiblement le 3 mai 1912, quelques jours avant ses 72 ans. À partir de 1960, la communauté va se répandre en Amérique centrale.

Pour moi, mère Marie-Léonie est d’abord une femme de foi et de prière, qui a montré le visage miséricordieux d’un Dieu d’amour à une époque où celui-ci était plus craint qu’aimé. Cette femme de cœur s’est tellement identifiée à Jésus doux et humble qu’elle a été, comme lui, solidaire des plus petits et généreuse de son temps. Femme audacieuse, accessible, débrouillarde, déterminée, son humilité rimait avec simplicité et liberté. Femme de confiance et de compassion, elle était une source d’espérance pour ses sœurs et pour les personnes qui la rencontraient. Femme fidèle et engagée, elle remettait les gens debout en les accueillant tels qu’ils étaient. Aujourd’hui, elle nous rapproche encore de Dieu et elle intercède pour nous. Son témoignage de vie est criant de vérité. Comme l’écrivait si bien Paul VI dans son exhortation apostolique L’évangélisation dans le monde moderne : « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins » (Evangelii nuntiandi, no 41).

Mère Marie-Léonie a été béatifiée à Montréal, le 11 septembre 1984, par Jean-Paul II. Au cours de son homélie, le Pape l'a appelée « humble parmi les humbles ». Cette attitude d’humilité a été le socle sur lequel s’est érigé tout son édifice spirituel. Elle disait souvent aux soeurs de sa communauté: « Ayez l’esprit de simplicité et d’humilité. Travaillez sérieusement tous les jours à devenir de plus en plus humbles. Soyez humbles, sans aucune prétention, aimant à vous oublier et à faire plaisir aux autres, et vous serez toujours heureuses. Une religieuse humble est assurée du bonheur. »

 L’Église nous propose cette prière d’ouverture pour sa fête liturgique qui est célébrée le 4 mai : "Dieu, qui as fait de la bienheureuse Marie-Léonie un modèle admirable d’humilité, de charité et de dévouement au service des ministres de ton Église, accorde-nous d’imiter ses vertus en puisant comme elle en Jésus, Prêtre éternel et Pain de vie, la force de suivre le chemin de l’Évangile. Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu, qui règne avec toi et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles de siècles. Amen."

Une femme sacerdotale

Mère Marie-Léonie vivait de la présence de Dieu partout, surtout au cœur des épreuves, qui la recentraient sur sa mission profonde. Elle écrit à l'une de ses filles spirituelles: "Ma foi venait de la présence de Dieu que je sentais en moi. Il a toujours eu la première place dans ma vie. J’étais convaincue que l’âme qui ne perdait pas la présence de Dieu en elle avait trouvé un trésor que personne ne pouvait lui ravir." Son regard de foi l’a guidée sur des chemins qui la délestaient du superficiel pour la conduire à l’essentiel du don d’elle-même. Elle désirait plus que tout « se consumer dans l’amour de Dieu et faire toutes choses pour son amour ». C’était sa manière de vivre son sacerdoce baptismal, aussi appelé « sacerdoce commun des fidèles », que le concile Vatican II mettra en lumière cinquante ans après sa mort.

« Piété et dévouement », telle est la devise de sa communauté. Ce programme résume toute la vie et la spiritualité de mère Marie-Léonie. Comment vivre l’amour sans la prière et le dévouement ? Prier pour les prêtres, contempler Jésus-Eucharistie, se former une âme sacerdotale en se laissant configurer au Christ serviteur, vivre le mystère de la Sainte Famille dans l’humble service de Nazareth, voilà ce que la fondatrice voulait pour sa famille religieuse. C’était son charisme, sa mission. Elle s’est reconnue dans la vocation d'écoute de la Vierge Marie et dans celle de service des femmes disciples qui suivaient Jésus. Elle s’est associée aux prêtres, dans les paroisses, diocèses, sanctuaires, séminaires, permettant à des femmes de s'épanouir dans ce service d'amour.

Mère Marie-Léonie a perçu la grandeur du prêtre au-delà même des hommes faibles qui étaient ordonnés, car elle voyait le Christ en eux, le Christ parmi nous. Cette vision de foi peut réconforter le prêtre d'aujourd'hui dans sa mission d’annoncer la Parole de Dieu avec ardeur, de rassembler le peuple pour une nouvelle évangélisation, de célébrer les sacrements du salut dans un esprit de prière et de service.

Une femme de service

La conscience sociale de celle qu'on surnommait « la mère de toutes nécessités » peut nous interpeller aujourd’hui, à une époque où nous nous indignons de plus en plus des écarts entre les riches et les pauvres. Elle économisait pour mieux aider les démunis, ne gaspillait pas mais recyclait, ne laissait personne dans le besoin lorsqu’on frappait à sa porte. Elle voyait en l’autre le Christ lui-même, parce qu’elle fréquentait Dieu comme si elle voyait l’invisible.

Jésus demeure le grand modèle de cet engagement envers les plus faibles. S’il y a une page d’Évangile qui caractérise bien la vie de mère Marie-Léonie et de ses Petites Sœurs, c’est bien la scène du lavement des pieds. Jésus montre ainsi que l’Église n’est pas un pouvoir, mais un service.

La sainteté à la Marie-Léonie peut être vécue par tout le monde, puisqu’il n’y a rien d’extraordinaire et de décourageant dans sa vie, à l’exemple de la vie toute simple de Nazareth. C’est la petite voie de confiance de Thérèse de Lisieux. Marie-Léonie chante les mêmes notes que celles de la carmélite, qui prend l’ascenseur de l’amour que sont les bras de Jésus. Quelle belle mélodie ! Se laisser porter par Dieu pour mieux lire sa portée dans notre vie. Une sainteté au quotidien, une sainteté des petits pas, une sainteté joyeuse, franche, humble, légère, libre : « Soyez heureuses en Dieu et pour Dieu, que toutes vos actions soient faites avec la plus grande pureté d’intention, disant souvent pendant la journée : “Tout pour vous, mon Dieu.” »

Depuis 2017, les restes mortels de mère Marie-Léonie se trouvent dans une châsse qui est située sous l’autel du transept sud de la Basilique-Cathédrale Saint-Michel de Sherbrooke. Lorsque les portes de la basilique-cathédrale sont ouvertes, il est possible de venir la prier et de visiter le musée, aménagé dans quatre alcôves, qui fait mémoire de son histoire et de l’institut qu’elle a fondé, les Petites Sœurs de la Sainte-Famille. Voir le site: https://www.centremarie-leonieparadis.com/index.php

Le 24 janvier 2024, le pape François a autorisé la canonisation de Mère Marie-Léonie. On attribue à son intercession la guérison miraculeuse d'un nouveau-né de sexe féminin à la suite d'une «asphyxie périnatale prolongée avec défaillance de plusieurs organes et encéphalopathie» à Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec, en 1986. La date de sa canonisation à Rome sera connue un peu plus tard. Lire l'article du Vatican News.  

Pour aller plus loin: Les chemins de l'Évangile. Entretiens avec Marie-Léonie Paradis (Novalis)
Les saints, ces fous admirables (Béatitudes/Novalis, 2018, p. 130-133).
Mon interview de 30 minutes sur Marie-Léonie à Radio VM, Montréal, cliquez ici.

Ma vidéo de 40 minutes sur la vie et la mission de mère Marie-Léonie dans ma chaîne YouTube, ajoutée le 15 avril 2021.

Livre: Derniers fragments d'un long voyage
29 avril: Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)

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mardi 16 avril 2024

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