Au livre des Actes des Apôtres, attribué à l’évangéliste Luc, nous voyons les Apôtres témoigner de leur foi devant le grand conseil. Nous retrouvons là l’essentiel de l’annonce chrétienne : Jésus est mort pour le pardon des péchés, Dieu l’a ressuscité et exalté. Même si l’on interdit à Pierre et à ses compagnons de parler au nom de Jésus, ils ne peuvent pas se taire : « Quant à nous, nous sommes les témoins de tout cela, avec l’Esprit Saint, que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent. » (Actes 5, 32) Ils sont fouettés, puis relâchés, mais eux repartent « tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus. » (Actes 5, 41) Comment ces hommes, jadis si peureux, sont-ils devenus aussi hardis dans leur foi ? C’est l’œuvre de l’Esprit de la Pentecôte, bien sûr, mais aussi des expériences profondes qu’ils ont vécues avec le Ressuscité lorsqu’il...
Le blogue de Jacques Gauthier
La Semaine sainte est une belle occasion de méditer sur le sens profond de la souffrance assumée dans l’amour. Jésus offre librement sa vie par amour en prenant nos péchés sur lui pour nous sauver. Il nous invite à participer à sa souffrance et à sa mort pour qu’il ressuscite en nous et dans les autres. C’est ce que saint Paul a montré en voulant prendre sur lui la malédiction qui pesait sur ses compatriotes : « Moi-même, pour les Juifs, mes frères de race, je souhaiterais être anathème, séparé du Christ » (Romains 9, 3). Cette substitution au Christ lui fera dire : « Je me suis fait tout à tous pour en sauver à tout prix quelques-uns » (1 Corinthiens 9, 22). Vivre pour les autres Le serviteur souffrant d’Isaïe préfigurait cette substitution : « C’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous pensions qu’il était...
« Le sentiment universel de piété a donné la prière, et celle-ci produit de la religion », écrivait le poète Novalis. Littéralement, prier est un acte de religion par lequel on s’adresse à Dieu. Ainsi, quand un événement se fait menaçant ou que la mort frappe à la porte, la personne a souvent le réflexe d’implorer un être supérieur qui peut la secourir. Mais prier, c’est aussi se mettre en présence de Dieu en se recueillant, en méditant sa parole, en le rencontrant tout au long de la journée par des actes intérieurs de foi, d’espérance et d’amour. Prier ainsi dans le silence nous apprend à mourir. Car ce n’est pas une mince affaire que de durer dans la prière, d’être attentif au mystère de Dieu, de lui offrir notre patience devant son silence, de nous abandonner à sa miséricorde en nous laissant transformer par son Esprit d’amour. Mourir à soi-même...
Dans sa quatrième exhortation apostolique Christus vivit, « Il vit, le Christ », le pape François propose un parcours de foi qui orientera la pastorale des jeunes dans l’Église. Écrite sous forme d’une lettre adressée aux jeunes et à tout le peuple de Dieu, le texte d’environ 150 pages, divisé en 9 chapitres, arrive cinq mois après la fin du synode des évêques sur « les jeunes, la foi et le discernement vocationnel ». On reconnaît d’emblée le style direct et personnel de François, qui s’exprime souvent à la deuxième personne, dans la foulée de son exhortation précédente sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel Gaudete et Exsultate. Le ton est donné dès le début, qui rappelle celui de son livre d’entretiens avec le journaliste italien Thomas Leoncini, Dieu est jeune : « Il vit, le Christ, notre espérance et il est la plus belle jeunesse de ce monde. Tout ce qu’il touche devient jeune, devient...
Le Carême me semble un bon temps pour réfléchir sur la sainteté, qui est toujours une expérience de la miséricorde divine. L’invitation est lancée au lundi de la première semaine de Carême : « Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint » (Lévitique 19, 2). À la fin de cette première semaine, Jésus reprend l’invitation comme en écho : « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Matthieu 5, 48). Mais que signifie être saint, est-ce synonyme de perfection et de canonisation ? Si l’habit ne fait pas le moine, la canonisation ne fait pas tous les saints. Et pourtant, « nous sommes tous appelés à la sainteté » (Vatican II). La sainteté relève de notre être baptismal, la canonisation vient de l’Église. Lorsque nous regardons de quoi nos journées sont faites, personne ne pense être canonisé. Ne marchons-nous pas sur le chemin de la sainteté avec nos imperfections ? Voici quelques questions...
Le pape François a voulu que le mois d’octobre 2019 soit nommé Mois missionnaire extraordinaire. Le thème : « Baptisés et envoyés : l’Église du Christ en mission dans le monde ». Il propose quatre dimensions spirituelles pour bien intégrer la Mission dans la vie : la rencontre personnelle avec le Christ, le témoignage des saints, la formation catéchétique à la Mission, la charité missionnaire. Je vais surtout me concentrer sur le premier point en partageant avec vous mon témoignage du Christ. Être aimé de Dieu Je suis aimé de Dieu. Voilà l’essentiel de ma vie. Dès ma jeunesse, je parlais à Jésus comme à un ami. Je lui chantais spontanément des chansons, lui confiant mon désir d’être son missionnaire, son témoin. Qui avait mis un tel amour et un tel désir dans mon cœur? L’Esprit Saint, sans doute ! « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a...
Comment devenir saint, sainte ? Qui se pose cette question aujourd’hui ? Elle semble venir d’un autre âge, loin des préoccupations de nos sociétés sécularisées. Cette interrogation un peu incongrue me paraît pourtant essentielle, justement parce qu’on ne se la pose pas souvent. Elle touche au sens de la vie et de la mort, renvoie à une transcendance, que nous appelons Dieu, qui est en nous et qui est plus que nous. Devenir ce que nous sommes Créés à l’image du Dieu trois fois saint, nous sommes appelés à lui ressembler. « Soyez saints pour moi, car moi, le Seigneur, je suis saint » (Lévitique 20, 26). Saints, mais ne lesommes-nous pas depuis le jour de notre baptême, lorsque nous avons été plongés dans la mort et la résurrection du Christ, participant ainsi à la sainteté même de Dieu ? Saint Paul nous le rappelle dans ses lettres : « À vous qui êtes appelés à être saints »...
À l’occasion de la Toussaint, les questions de Laetitia Lorusso, responsable des communications aux éditions des Béatitudes, sur mon livre Les saints, ces fous admirables (Novalis / Béatitudes, 2018, 344 pages). Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs en quelques lignes? Marié et père de famille, j’ai été professeur de théologie à l’Université Saint-Paul d’Ottawa durant une vingtaine d’années. Je me consacre maintenant à l’écriture, aux conférences et aux retraites spirituelles que je donne au Canada et en France. Poète et essayiste, j’ai publié soixante-quinze ouvrages et je collabore à plusieurs revues. Je tiens un blogue sur mon site Web : jacquesgauthier.com. Quelle est votre devise?« Tout est grâce » de Thérèse de Lisieux. Qu’aviez-vous à cœur de partager à travers votre livre? J’ai voulu partager l’admiration que j’éprouve pour ces hommes et ces femmes que la poétesse Marie Noël appelle des «fous admirables». Les saints et les saintes sont de véritables compagnons ou compagnes de route...
Je vous présente en quelques lignes ma biographie spirituelle sur Georgette Faniel, surnommée affectueusement "Mimi" par sa famille et ses amis. Cette femme célibataire peu connue du grand public a vécu discrètement à Montréal de 1915 à 2002, dans le don total de sa personne au Christ. Il l’a appelée très jeune à le suivre, elle s’est laissée transformer dans son amour. Il lui parlait clairement dans son cœur, elle répondait en toute simplicité. Elle n’a voulu qu’aimer, et c’est en aimant qu’elle a fait face à la souffrance dès l’âge de 6 ans, désirant partager celle de Jésus. Recluse dans son loyer, elle s’est effacée pour que Dieu ait la première place, recevant ses secrets dans le silence intérieur de la prière. Ce qui ne l’a pas empêchée de servir les plus pauvres en préparant du linge pour eux. Elle a accueilli des gens d’horizons variés qui la consultaient et...
La croix se dresse sur la collinel'étrange douleur effleure les côtesmarée montante de l’angoisse abyssaledu corps entier foulé dans le pressoir Tu enfantes des âmes chaque jourgrain de blé mûri pour la moissonla meule du moulin tourne à l’enverschamp du monde jonché d’os Tu laisses des paroles à la traînecailloux rougis sur notre route pour mieux retrouver ton nomton visage voilé au désert La terre et le ciel réunisle temps et l’espace suspendustout le sang coagulé dans une larmesel du juste qui fait pencher la balance Le fil sur le point de se rompreau moindre cri à bras-le-corps prière qui exorcise le mal fige le corps perce le cœur La chair meurtrie dans la nuitn’en finit plus de vibrer de lumièresouffle de l’âme en partance du royaume inconnu de la soif Tu accueilles la plaie visible de l’alliancefeu qui consume le calice des fleursau centre habité de l’humble présenceblessure qui guérit en blessant de nouveau Pour aller plus loin: Georgette Faniel, le...
L’alliance est le thème clé qui traverse toute la Bible. On parle d’ailleurs de l’Ancien et du Nouveau Testament comme de l’Ancienne et de la Nouvelle Alliance. Une alliance indique une union ou un contrat entre deux personnes, deux familles, deux peuples. C’est une promesse de fidélité, un traité pour les générations à venir. Elle est souvent symbolisée par une arche, un arc-en-ciel, un anneau. Il est intéressant de constater que les époux portent l’anneau à l’annulaire gauche, comme une alliance nouée au cœur, symbole du don et de l’engagement. L’Ancienne Alliance Dieu utilise cette symbolique forte de l’alliance pour parler de l’amour qu’il porte envers son peuple. Ce pacte entre lui et Adam est renouvelé avec Noé et à ses fils : « Voici que moi, j’établis mon alliance avec vous, avec votre descendance après vous […] Je mets mon arc au milieu des nuages, pour qu’il soit le signe de...
Dans son Histoire d’une âme, Thérèse de Lisieux définit ainsi la prière : « C’est un élan du cœur, c’est un simple regard jeté vers le Ciel, c’est un cri de reconnaissance et d’amour au sein de l’épreuve comme au sein de la joie ; enfin c’est quelque chose de grand, de surnaturel qui me dilate l’âme et m’unit à Jésus ». On peut dire la même chose de l’oraison chrétienne, qui est une forme de prière intérieure et silencieuse où l’on porte un simple regard d’amour vers le Christ qui nous aime. Une relation de personne à personne Comme toute relation de personne à personne, l’oraison est « une réalité simple et complexe, à la portée de tous », écrit Henri Caffarel au début des Cinq soirées sur la prière intérieure. Il suffit de s'arrêter, d’accueillir le moment présent comme une grâce, de s'asseoir en silence dans la confiance au Christ, de l’aimer et de se...
Dans Une saison en enfer, Rimbaud écrit que « le combat spirituel est aussi brutal que la bataille d’hommes ». Or, s’il est un lieu privilégié où se déroule ce combat spirituel, c’est bien l’oraison, appelée aussi prière contemplative ou prière de silence. Que de chrétiens la commencent avec enthousiasme et l’abandonnent en cours de route. Y a-t-il plus d’anciens combattants que de jeunes recrues pour cette forme de prière intérieure ? Ne nous décourageons pas, nous pouvons toujours reprendre les armes si nous le voulons, car c’est avant tout une question de désir, de volonté, d’amour, de foi. L’oraison n’est pas une guerre pour surperhéros, elle est au plus un combat spirituel pour les pauvres que nous sommes. Je veux ce que tu veux Le père Henri Caffarel (1903-1996) a montré dans ses nombreux livres que l’oraison est une orientation libre de tout notre être vers Dieu. « Seigneur, je veux de cette oraison ce...
Deuxième partie de l'entretien avec Nathalie Calmé sur la crise de la quarantaine paru dans la revue Sources, no 40, décembre 2017. Pour lire la 1er partie, cliquez ici. Au moment de la crise de la quarantaine, le désarroi spirituel du croyant est parfois comparable, selon vous, à une « nuit mystique »... La nuit mystique surgit du fond de notre misère humaine, de la crise du désir vécue à la quarantaine. Le croyant s'en remet à Dieu. Sa foi lui fait comprendre mystérieusement que c'est Dieu qui agit en lui. Il l'invite à la paix du cœur en le faisant passer par la nuit du dépouillement. Dieu plonge son cœur dans le vide et la sécheresse en lui montrant ce qui est faux et ombrageux : égoïsme, orgueil, agressivité, dépendance, jalousie. Le Tout éclaire son côté destructif. Il s'ensuit une grande douleur de se savoir indigne d'un tel amour. La nuit mystique dépasse tout ce...
Je vous partage la conférence que je donnerai au collège des Bernardins à Paris le 9 décembre 2017 lors du colloque Henri Caffarel: prophète pour notre temps. Une nécessité vitale L’oraison avait la première place dans la vie du père Caffarel parce que le Christ l’avait également. Dès le début de son apostolat auprès des couples en 1936 et jusqu’à la fin de sa vie, cet homme de foi priait de longues heures par jour, souvent devant le Saint Sacrement, et s’accordait des mois de désert chaque année. Voici comment il s’adonnait à l’oraison, selon les propos d’un témoin: « Assis sur son petit banc de prière, le corps et la tête bien droits, les yeux le plus souvent clos, les mains largement ouvertes sur les genoux, parfaitement immobile, tout recueilli, tout présent à Dieu présent au plus intime de lui-même. Plus rien ne comptait. On aurait dit qu’il était à la...
En ces temps du divertissement à tout prix, de la dépendance aux écrans, de la consommation à outrance, c’est devenu tout un exploit d’entrer en soi, d’accueillir le silence, et d’écouter son propre vide intérieur qui appelle obscurément un sens, un salut. Nous sommes passés d’une société de devoir et de l’obligation à une société de l’individualisme et de l’autonomie. Ce n’est pas négatif en soi, mais ce passage peut ouvrir la porte à des idéologies sans intériorité. Aujourd’hui, les gens ne veulent pas qu’on leur dise quoi faire ou penser, même s’ils sont manipulés par de nouveaux fabricants d’opinions comme les réseaux sociaux. Ils n’ont pas envie de dépendre des autres, encore moins d’un Dieu. Créateurs, oui ; créatures, non. L’antique tentation de se constituer en juges suprêmes du bien et du mal est récurrente : « Vous serez comme des dieux. » (Gn 3, 5). Dieu est ainsi perçu comme un tyran jaloux...
Un jour, j’étais à Cuba et je me baignais dans une mer houleuse. Je m’étais éloigné du rivage sans m’en rendre compte, aspiré au large par le ressac des vagues écumeuses. Je ne touchais plus le fond, le souffle commençait à manquer. Je me concentrais sur ma respiration pour ne pas paniquer. J’espérais m’en sortir en nageant de côté à travers le vacarme des flots déchaînés. J’avais l’impression de faire du surplace. Je parlai spontanément au Christ, comme il m’arrive de le faire dans la journée : « Ce serait complètement absurde de mourir ainsi, donne-moi la force de m’en sortir ». Finalement, après un ultime effort, je sentis le sable sous mes pieds. Ouf ! J’étais sauvé. Je partageai ma mésaventure à mon épouse. Je me voyais comme un survivant sur la plage, rempli d’espérance en la vie, qui ne tient vraiment qu’à un fil. Face à la mort, la vie...
Une journaliste m'a demandé un jour de lui parler du karma. Elle entendait souvent ce mot dans les conversations et ne savait pas trop quoi en penser. En effet, ce concept est à la mode, comme les mots mantra et nirvana. Le karma se veut une tentative de réponse aux questions métaphysiques que nous nous posons : "Où étais-je avant de naître ? Pourquoi la souffrance et le mal? Y a-t-il quelque chose ou quelqu’un après la mort ?" Un concept lié à la réincarnation Le karma est un élément clé de la philosophie bouddhiste. Il est complètement étranger à la tradition judéo-chrétienne. On ne retrouve pas ce terme dans la Bible. Le karma veut dire activité, action, les effets qui en découlent et qui nous attachent à l’existence. Le Bouddha enseigne qu’il faut se détacher de tout désir et de tout sentiment pour triompher du karma et ne plus craindre de renaître...
« Il est grand le mystère de la foi », proclame le prêtre à la messe à la suite du récit de l'institution de l'Eucharistie. Ce mystère d’une présence, où se vit le merveilleux échange entre le Christ et nous, de son corps et de son sang, est un trésor qui doit être sans cesse redécouvert. (Photo prise au Foyer de Charité de Sutton au Québec) Une présence active L’action liturgique rend en effet présent le Christ ressuscité sous quatre modes principaux. Il est présent dans l’assemblée en prière : « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux » (Matthieu 18, 20). Il est présent dans sa parole qui nous révèle le Père. Il est présent dans la personne du ministre qui agit en son nom. Enfin, il est « présent […], au plus haut point », sous les espèces eucharistiques (document conciliaire de...
Luc est le seul évangéliste qui rapporte le beau récit des deux disciples qui, le jour de Pâques, font route « vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem » (Luc 24, 13). Les dimensions poétique, pédagogique, théologique et liturgique de ce texte m’enchantent. L’essentiel de la foi y est raconté sobrement en termes de rencontre et de reconnaissance. Le Christ ressuscité y est présenté comme un compagnon de route qui marche avec nous et se révèle lors du partage de la parole et du pain. On comprend que cette scène de l’Évangile ait pu inspirer tant d’écrivains et de peintres. Un récit pour aujourd’hui De nombreux symboles, évoqués dans ce texte, restent d’actualité : la route, la désillusion de Cléophas, le lent réchauffement du cœur grâce à la parole de Jésus, le soir qui approche, le repas à la maison, la fraction du pain, l'ouverture de l’esprit et des yeux,...
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