Le blogue de Jacques Gauthier
École de prière (53) Prier debout
Le corps peut être un allié dans la prière. On ne prie jamais sans lui. À chacun et à chacune de trouver la bonne posture qui l’aide à descendre au fond de son cœur, lieu de toute vraie prière. Nous avons vu aux articles précédents de l'"École de prière" comment prier assis et à genoux, je vous suggère quelques pistes qui peuvent aider à prier debout.
Se tenir droit
Il est important de prendre conscience du corps lorsqu’on est debout pour prier, en privé ou en public. Les pieds reposent bien à plat sur le sol, joints ou légèrement écartés, plantés dans l’humus de notre humanité. Il est bon de sentir ce sol qui nous relie à la terre, humblement. Le bassin est droit, pour l’équilibre et la stabilité. Le dos doit être redressé, sans effort et sans tension. Le regard peut être centré sur une croix ou une icône, puis nous fermons les yeux pour laisser parler le cœur en silence, au rythme lent de la respiration, comme un mouvement d’amour.
Il y a une géographie du corps qui ramasse tout notre être pour l’offrir au Père. Si on étend les bras, le corps prend la forme de la croix. Tel un arbre enraciné dans le sol déploie ses branches vers le ciel, nous embrassons le monde avec le Christ. Ne sommes-nous pas crées pour ouvrir les bras et pour aimer? Au centre du corps debout, il y a le cœur, point de jonction de l’horizontal et du vertical, alliance de la terre et du ciel, rencontre de l’extérieur et de l’intérieur. Marie est une belle image d’un cœur ouvert et offert. Stabat Mater, debout au pied de la Croix, elle s’élève avec le Fils pour n’être plus qu’offrande, corps et âme.
Les mains peuvent prendre différentes attitudes : levées vers le ciel en geste d’offrande, repliées sur la poitrine en signe d’écoute, jointes pour l’attention à la présence de Dieu, doigts croisés pour la supplication ou le recueillement en Dieu, paumes ouvertes en signe d’accueil. « Que ma prière devant toi s'élève comme un encens, et mes mains, comme l'offrande du soir » (Ps 140, 2).
Respect et disponibilité
La station debout exprime le respect et l’attention devant Dieu ou devant une personne à laquelle l’honneur est dû. Qu’est-ce que nous faisons lorsque nous attendons un ami et qu’il arrive? Nous nous levons spontanément pour l’accueillir, nous lui tendons les bras ou nous lui donnons la main.
L’attitude debout dans la prière exprime aussi la disponibilité pour écouter le Seigneur, pour obéir à la mission à laquelle il nous destine. Elle n’est pas un garde-à-vous militaire, mais une attitude d’attention et de disponibilité à Dieu. Dans l’Ancien Testament, le prêtre se tient debout et offre le sacrifice. Le peuple se met debout lorsqu’Esdras ouvre le livre de la Loi (cf. Ne 8, 5). Durant l’Eucharistie, les fidèles se lèvent pour écouter l’Évangile. Jésus, nouveau grand-prêtre, resta debout devant Pilate pour s’offrir lui-même en sacrifice.
Cette position était commune en son temps. Il fait mention de ceux qui prient ainsi pour se faire voir des hommes. Il met en garde contre l’hypocrisie et l’orgueil de ceux qui prennent cette position de la prière pour se faire remarquer des hommes et non du Père qui voit dans le secret. «Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites : ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et aux carrefours pour bien se montrer aux hommes quand ils prient. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense» (Mt 6, 5).
Jésus illustre son enseignement de la prière par la parabole du pharisien et du publicain (Lc 18, 9-14). Il reproche au pharisien son autosatisfaction et son mépris du publicain, alors que ce dernier se tient à distance, n’osant pas lever les yeux vers le ciel et se frappant la poitrine. Jésus déclare que c’est le publicain qui est juste, car «qui s’abaisse sera élevé» (Lc 18, 14).
En attente de résurrection
Pour un chrétien, la position debout évoque la résurrection. Le mot « ressusciter » signifie « s’éveiller, se lever, se mettre debout ». Prier debout, c’est vivre dans l’attente de la résurrection.
La station debout est la position liturgique la plus ancienne. Les premiers chrétiens célébraient le dimanche debout, parce qu’ils fêtaient la résurrection du Christ. Baptisés dans sa mort, ils vivaient en «ressuscités», manifestant ainsi leur espérance chrétienne. À leur suite, nous accueillons la vie du Christ en nous enracinant dans sa Parole qui met en route, comme l’exprime cette antienne qui accompagne souvent le psaume 50 : «Oui, je me lèverai, et j’irai vers mon Père».
"C’est debout que nous faisons nos prières, au premier jour de la semaine, mais nous n’en savons pas tous la raison. Car ce n’est pas seulement parce que, «ressuscités avec le Christ et devant chercher les choses d’en haut», nous rappelons à notre souvenir, en ce jour consacré à la Résurrection, en nous tenant debout lorsque nous prions, la grâce qui nous fut donnée, mais parce que ce jour-là paraît en quelque sorte l’image du siècle à venir." (Basile de Césarée, Traité du Saint Esprit, 27.2, Cerf, 1968, p. 485).
Article paru dans Magnificat, no 293, avril 2017, p. 7-10.
Pour aller plus loin: La prière chrétienne. Guide pratique (Presses de la Renaissance) et Expérience de la prière (Parole et Silence).
À propos de l'auteur
Marié et père de famille, poète et essayiste, son oeuvre comprend plus de 80 livres, parus au Québec et en Europe, et traduits en plusieurs langues. Il a enseigné vingt ans à l'Université Saint-Paul d'Ottawa. Il donne des conférences et retraites que l'on retrouve dans sa chaîne YouTube. Pour en savoir plus: Voir sa biographie.
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