Le blogue de Jacques Gauthier
Journée mondiale des grands-parents
Le 31 janvier 2021, le pape François annonçait l'institution d'une Journée mondiale des grands-parents et des personnes âgées, qui sera célébrée par toure l'Église le 4e dimanche de juillet, autour de la fête des grands-parents de Jésus, sainte Anne et saint Joachim, le 26 juillet. La première Journée mondiale a donc lieu le dimanche 25 juillet. À cette occasion, le Saint-Père a publié un message très personnel aux grands-parents et aux personnes âgées.
Il souligne que les gens âgés ne sont pas des personnes inutiles, contrairement à ce que l'on pourrait penser. Lui-même a été appelé à devenir Évêque de Rome au moment où il avait atteint l’âge de la retraite. "Le Seigneur est toujours proche de nous, toujours, avec de nouvelles invitations, avec de nouvelles paroles, avec sa consolation. Il est toujours proche de nous. Vous savez que le Seigneur est éternel et ne prend jamais sa retraite, jamais."
En rappelant l'envoi en mission de Jésus à ses disciples, le pape insise sur la vocation des grands-parents, qui est "de conserver les racines, de transmettre la foi aux jeunes et de prendre soin des plus petits". Il met de l'avant trois piliers pour construire le monde de demain: les rêves, la mémoire et la prière.
"L’avenir du monde réside dans cette alliance entre les jeunes et les personnes âgées [...] Cette mémoire peut aider à construire un monde plus humain et plus accueillant. Mais, sans la mémoire, on ne peut pas construire ; sans les fondations, tu ne construiras jamais une maison. Jamais! Et les fondations de la vie sont la mémoire. Enfin, la prière. Comme l’a dit une fois mon prédécesseur, le Pape Benoît, le saint vieillard qui continue à prier et à travailler pour l’Église, : « La prière des personnes âgées peut protéger le monde, en l’aidant probablement de manière encore plus incisive que l’activisme de tant de personnes ».
François avait commencé son message en soulignant l'impact de la pandémie pour les personnes âgées, il termine en donnant l'exemple de l'ermite Charles de Foucauld, qui sera bientôt canonisé.
"Je demande au Seigneur que, suivant son exemple, chacun de nous puisse élargir son cœur, le rendre sensible aux souffrances des derniers, et capable d’intercéder pour eux. Que chacun de nous apprenne à répéter à tous, et aux plus jeunes en particulier, ces paroles de consolation qui nous ont été adressées aujourd’hui : “Je suis avec toi tous les jours” ! Allons de l’avant et courage !"
Un sentiment d'appartenance
Dans le cinquième chapitre de mon livre Les défis de la soixantaine, consacré aux grands-parents, je reprends cette idée maîressse du pape François: la transmission de l’histoire, de la foi, des valeurs, passe surtout par les grands-parents. Voici quelques extraits de ce chapitre.
Les petits-enfants s’imprègnent de la vie des aînés, de leur humour et de leur sagesse. C’est en les côtoyant qu’ils ont envie de grandir. Les grands-parents sont un point d’ancrage et de stabilité dans une société en mutation où les horaires surchargés grignotent du temps sur la vie familiale. En prenant du temps avec leurs petits-enfants, ils créent un sentiment d’appartenance et de bien-être. Leurs gestes d’accueil et d’affection sécurisent leurs petits-enfants et cultivent ainsi l’esprit de famille, même si les types de famille varient beaucoup : monoparentales, reconstituées, etc.
Naître, grandir, devenir parents et grands-parents, c’est une grâce, c’est-à-dire un cadeau de la vie, un don de Dieu. Quelle joie de voir en nos petits-enfants la fécondité de la vie et la continuité de l’alliance entre Dieu et l’humanité ! Ils sont d’abord des êtres uniques, des enfants de Dieu, créés à son image, que Jésus est venu nous révéler comme étant notre Père. De cette source divine découlent plusieurs filiations : notre enfant devenu parent et nous-mêmes grands-parents, notre famille immédiate et élargie, le conjoint ou la conjointe de notre enfant, ses parents et sa famille.
L'enracinement de notre mémoire
En racontant quelques anecdotes significatives les grands-parents aident leurs petits-enfants à prendre conscience que leurs parents ont aussi été enfants et adolescents et que chacun fait son chemin pour devenir adulte. Les grands-parents sont pour lui un repère dans ce récit, un lieu stable de la mémoire familiale. S’ils jouent parfois un rôle parental de substitution, cela ne peut durer qu’un temps. La mission des grands-parents est de soutenir leurs enfants et petits-enfants dans l’amour gratuit.
Les grands-parents transmettent à leurs enfants et petits-enfants un enracinement qui tient autant de la mémoire que de l’avenir. Cela se vit surtout autour de la table familiale, lors des repas, des fêtes et des anniversaires. Les recettes culinaires circulent ainsi de génération en génération. Les repas en famille et les récits de vie des grands-parents, leurs histoires et leurs prières, les conseils chuchotés en douce et les clins d’œil complices, transmettent une culture à l’enfant, l’ouvrent sur le monde, l’aident à se situer dans le temps et l’espace. « De mon temps, il y avait… », ils sont surpris qu’on existât avant les couches jetables, les Mac Do, Internet, les jeux vidéo, les tablettes numériques et les téléphones dits intelligents.
Une référence morale et spirituelle
Les grands-parents sont souvent une référence morale et spirituelle pour leurs petits-enfants, qu’ils soient jeunes, adolescents ou adultes. Leur rôle est de faire découvrir, partager, transmettre, former, laisser une trace, nourrir le désir, donner des racines. Ils n’ont pas à éduquer leurs petits-enfants, puisque c’est le rôle des parents. Ils ont à être présents à ce qu’ils vivent, à les accueillir tels qu’ils sont, à recevoir leurs confidences et leurs rêves, surtout au moment de l’adolescence, sans les juger. Le contact est d’autant plus facile si les grands-parents ne jouent pas aux grandes personnes qui savent tout. Ils sont assez proches de leur fragilité et de leur cœur d’enfant pour ne pas faire la morale inutilement.
En transmettant à leurs petits-enfants le désir de vivre et d’aimer, les grands-parents leur transmettent la foi en eux et en l’autre. Cette transmission se vit idéalement dans l’accueil, le pardon, le respect. Ces valeurs profondes cimentent les membres de la famille, qui ne sont jamais parfaits, et jettent les bases pour une société plus juste.
Mais qu’en est-il de la foi chrétienne qui a façonné nos sociétés occidentales de jadis ? Elle ne se transmet pas comme un livre de recettes, un héritage du passé, un catalogue de traditions qu’on lègue automatiquement. La foi n’est pas un gène qui se transmet par hérédité, c’est un don de Dieu. Elle est une réponse libre à un appel personnel. La foi est toujours relationnelle ; c’est un « je » humain qui entre en relation de confiance avec un « tu » divin qui l’aime d’une manière inconditionnelle.
Les grands-parents, grâce au recul que leur donne l’expérience, peuvent être des éveilleurs de foi pour leurs petits-enfants en les écoutant, les encourageant, les rassurant, les confiant à Dieu. Ils les éveillent à la foi par leur parole d’amour et leur exemple vivant. Ils peuvent nommer Dieu qui est présent dans leur vie, leur révéler qu’il y a quelque chose de grand et de saint en eux qui échappe à toute emprise. Ils peuvent aussi les faire entrer en contact avec ce qu’il y a de sacré en eux, par la contemplation d’un paysage ou par l’expérience communautaire de la liturgie.
On ne naît pas parents et grands-parents, on le devient, et on n'a jamais fini de le devenir. Ayons confiance en notre rôle en favorisant une bonne communication dans la famille. Dieu est patient, son temps n’est pas notre temps. Il a un projet d’amour pour chacun de nous. Il nous appelle sans cesse à la confiance, car sa semence travaille jour et nuit. C’est lui qui fait grandir.
Pour aller plus loin, la nouvelle édition revue et augmentée de mon livre Les défis de la soxantaine (Emmanuel / Novalis, 2021, 248 p), surtout le chapitre 5, "Devenir grands-parents", p. 125-141.
Lire aussi ce texte du Vatican pour la Journée mondiale des grands-parents.
Et mon article du blogue Joachim et Anne, parents de la Vierge Marie.
À propos de l'auteur
Marié et père de famille, poète et essayiste, son oeuvre comprend plus de 80 livres, parus au Québec et en Europe, et traduits en plusieurs langues. Il a enseigné vingt ans à l'Université Saint-Paul d'Ottawa. Il donne des conférences et retraites que l'on retrouve dans sa chaîne YouTube. Pour en savoir plus: Voir sa biographie.
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